C’est le début de la saison des pluies, mais sans aucune larme pour me rafraichir.

Une terrasse brulante me souffle une lumière tamisée par une jalousie immaculée.

De retour d’un déjeuner, je me suis allongée dans cette chambre, à court de métaphores pour ainsi dire.

Je n’ai pas envie de t’écrire un poème aujourd’hui.

Ni de tourner la page ; que je déteste cette expression simpliste.

Laisse-moi me vautrer davantage dans ce lit, faire la sieste en plein après-midi.

M’abandonner une fois encore dans ces draps emplis de nos intempérances.

Et si pour aller mieux, il me fallait tomber la plume, que je puisse ne plus jamais écrire ?

Musser ma bonne fortune sous ton odeur de cannelle.

M’arrêter face aux feux écrasants de notre étoile, enrichir ma sensualité en lui murmurant des quêtes pour lui dire toute ma gratitude.

Boire des mojitos et rouler des pelles en savourant ses faveurs.

J’ai presque envie de rire à gorge déployée. Pour te provoquer.

Marcher au rythme sacré de mon anatomie sauvage.

En écrivant ces quelques lignes, je fredonne une chanson qui me rappelle ce que je suis venue faire en ce monde.

Me délecter de situations qui excitent mon imaginaire, intriguent mes sens et interrogent mon âme.

Mon âme qui se laisse envahir d’une douce mélancolie.

J’ai envie de manger avec mes doigts et de t’écouter avec une innocente bienveillance mêlée d’une once d’espièglerie.

Je t’offre mon regard rempli de gourmandise à ta franche lippée et colorée.

Et pourtant je n’oublie rien, je ne zappe rien, je ne rhabille pas ma vie comme si rien avant n’était arrivé.

Ma substance vitale est comme cette filandre continue que je tisse inépuisablement.

Je n’oblitère jamais personne, je suis faite de tous mes souvenirs, même les plus sombres, de tous mes amours, même les plus décevants.

Alors, rattrapée par cette fictive réalité, j’épanche souventefois une petite ondée apaisante.

Je suis telle une mosaïque vivante de ces petits moments d’existence, construite avec vous, érigée pour vous et chacun de vous m’avez façonnée et meurtrie.

Je n’ai jamais tourné aucune page, je continue inlassablement à les écrire, jusqu’au point final.

Je relis ces quelques lignes, mes yeux se plissent lentement, je m’ensommeille enfin, sans rêve.