Comme tous les samedis matin en ces lieux.

Je marche pieds nus dans le sable, face sud au soleil, du vent, de plus en plus brulant.

Perdue dans mes pensées, le fond de l’océan, une romance dans les oreilles, quelque chose comme Lost on You.

En bordure du mausolée, un jeune enfant me fait signe, me parle. Il me distrait de mon vague à l’âme, je n’ai rien entendu.

Il me fait encore signe, de le suivre à quelques pas. D’autres enfants, six ou sept ans, très animés. Ils jouent autour d’un aménagement éphémère.

Dans ce liteau de sable, un petit chiot de quelques jours, pas sevré, les yeux encore mi-clos, plaintif.

Dans un recoin du réduit, un minuscule poisson mort, pour toute hypothétique nourriture.

Les enfants me parlent. Une vie contre quelques XOF.

Le chiot me sent, il avance vers moi, son unique porte de sortie, ses petits yeux noirs me transpercent.

J’hésite longtemps. Il ressemble tellement à ma petite Miska bébé. Si mon coeur me supplie, je renonce, je laisse ma raison prendre le dessus.

Comme une dernière culpabilité, je me rappelle des paroles du Petit Prince. Je parle aux enfants une dernière fois

– « Il est comme votre frère. Il est fragile. Vous êtes responsable de cette petite vie. Prenez soin de lui ! » sans aucune illusion

Et je pleure, de grosses larmes salées me brulent les joues.

Je reprends mon chemin sur la grève, sans aucun contrôle sur mes sanglots. Un arrière-gout d’injustice.

Je passe à côté d’un jeune homme. Il me transperce à travers mes lunettes noires, mon corps ne cache plus aucune émotion. J’étouffe.

– « Ça va madame ? »

– « Maa ngi fii rek » comme dans un souffle, sans m’arrêter

Rek comme restreint. Comme mon coeur abimé. Non je ne vais pas bien.

Et puis, je prends conscience. Du sombre et de la lumière de l’humanité.

Ne jamais se résigner. Et trouver ma place dans cette vie.

C’est mon égo qui pleure, impuissant devant cette situation.

La Teranga vient de me donner une belle leçon d’humilité.

Je marche pieds nus dans le sable, face sud au soleil, du vent, presque étouffant. Je suis plus forte.